Nous avons encore en tête le fiasco irakien et l’enlisement afghan des armées occidentales. Pourtant, nos armées disposaient d’une grande puissance militaire.
Force est de constater qu’il y a bel et bien un décalage croissant entre puissance militaire et capacité à atteindre les objectifs politiques fixés. Il semble évident, que les Occidentaux ne sachent plus gagner les guerres qu’ils choisissent de mener.
Nous le savons, les guerres contemporaines sont extrêmement complexes en raison notamment de l’évolution de leurs caractéristiques propres. Il est difficile de les conduire avec des outils militaires en phase de transition entre une époque révolue (la Guerre froide) et un avenir stratégique incertain.
Les guerres contemporaines ne peuvent être affrontées dans le champs classique et fortiori nucléaire de la guerre. La période que nous connaissons est avant tout marquée par un retour de la guérilla et du terrorisme (modes d’action qui offrent le moins de prise possible à l’action militaire classique).
Communément appelées « irrégulières » ou « asymétriques », cette forme de contournement stratégique fragilise considérablement les marqueurs classiques de la victoire militaire. Car désormais, les guerres contemporaines se déroulent « au sein des populations », confirmant ainsi le recul des conflits interétatiques.
Ces guerres menées par des petits groupes de combattants qui agissent de façon décentralisée et mobile, effacent les traditionnelles frontières entre temps de guerre et temps de paix, soldats et civils, champs de bataille et zone arrière.
Par voie de conséquence, le modèle actuel des armées occidentales paraît inadapté. En parallèle, le champ d’action du militaire s’est élargi et les armées modernes doivent être capables de mener de manière synchronisée des opérations de combat, de maintien de l’ordre ou humanitaires dans la même zone d’opération.
Autrement dit, nos armées doivent faire face à une guerre « dérèglementée » conduite au milieu des populations et contre des adversaires diffus.
Il apparaît donc nécessaire de réadapter nos appareils militaires à cette nouvelle donne. Nos armées doivent, évidemment, conserver une certaine avance technologique ainsi que des capacités de combats lourdes (chars, canons, navires de guerre et avions de combats) sur terre, sur mer, dans les airs ou dans l’espace.
Mais, il est aussi primordial de disposer de moyens plus « utiles » aux opérations actuelles. Comme par exemple, des moyens de renseignement, des hélicoptères lourds, des moyens de transports stratégiques aériens et maritimes, des unités logistiques renforcées, et des unités d’infanterie.
Notre outil militaire devrait s’inscrire dans le cadre d’une conception stratégique qui ne mette, néanmoins, pas en péril la capacité tactique des armées. L’outil militaire français devrait être modelé autour des composantes aériennes et navales, afin de parfaire sa dimension stratégique. Et ce, dans une logique de complémentarité entre ces deux armées.
Il convient également de réaffirmer la pertinence d’un outil terrestre robuste capable de mener des combats de forte intensité ou des actions en faveur de la paix. Toutefois, cette composante terrestre ne peut s’exprimer de manière autonome. Bien au contraire, dans les guerres modernes l’outil terrestre doit se compléter avec les armes aériennes et navales.
D’où la nécessité de disposer de systèmes d’information et de commandement performants et interopérables.
Comme dit précédemment, la dimension stratégique du renseignement devrait être affirmée. Le recours au satellite et au drone semble inéluctable et doit être entrepris dans une logique européenne compte tenu des investissements à consentir.
Nous le voyons clairement, cela fonctionne déjà dans l’observation spatiale avec les projets de coopération sur Hélios 2, SAR Luppe et Pléaides. Le développement d’autres capacités spatiales doit cependant rester une priorité.
Ces équipements permettraient à la France de disposer d’une capacité autonome d’analyse, mais aussi une certaine autonomie stratégique.
Pour renforcer son positionnement sur la scène internationale, la France doit concevoir son outil militaire dans un but résolument stratégique. Des ressources supplémentaires seront notamment nécessaires pour l’acquisition de nouvelles capacités.
Pour ce faire et dans un contexte économique morose, des voies (coopérations européennes) permettant des économies tout en garantissant l’efficacité opérationnelle d’ensemble devraient être davantage explorées.
L’heure est, en somme, venue de se déterminer et de faire preuve d’ouverture d’esprit afin de chercher le meilleur pour nos armées, et de disposer d’un outil militaire à la hauteur de nos aspirations.